Gabon
Raté ! Les installations de la dernière Coupe d’Afrique des Nations de football (CAN) dans le sud-est du Gabon, qui ont failli reprendre du service à l’occasion du choc contre le Côte d’Ivoire samedi, vont continuer à prendre la poussière en attendant un éventuel recyclage dans le tourisme.
Les autorités gabonaises ont envisagé cette semaine de délocaliser de Libreville à Franceville ce match des qualifications pour le Mondial-2018, suscitant la colère des Ivoiriens qui ont obtenu de rester dans la capitale.
Selon certaines sources, les autorités voulaient éviter le “climat tendu” à Libreville, avec le premier anniversaire des violences post-électorales des 31 août et 1er septembre.
Elles espéraient une ambiance plus sereine à Franceville et son annexe Bongoville, la ville natale de l’ex-président Omar Bongo, père d’Ali Bongo, l’actuel chef de l’Etat.
En cas de délocalisation, les Panthères du Gabon auraient redonné vie l’espace d’un week-end à l’hôtel et au stade d’entraînement de cette petite ville de 6.000 habitants, dans ce fief présidentiel de la province du Haut-Ogooué, si verte et vallonnée à la frontière du Congo.
L’hôtel et le stade ont été construits en 2011, pour la Coupe d’Afrique des Nations 2012 co-organisée avec la Guinée-équatoriale.
Lors de la CAN-2017 en janvier, organisée par le Gabon en solo, les Black stars du Ghana ont été logés à l’Heliconia avant leur demi-finale perdue contre le Cameroun. Le Sénégal et la Tunisie y avaient pris leur quartier pour les matches de poule, tandis que le Zimbabwe et l’Algérie se trouvaient dans d’autres hôtels Heliconia de Franceville et Moanda.
“J’ai même pu faire un selfie avec les frères Ayew”, se souvient en souriant l’une des dix-sept employées de l’hôtel Géraldine Angani, photo à l’appui avec les deux stars de la sélection du Ghana.
La réalité actuelle est moins glamour. “L’hôtel n’accueille plus personne, et nos salaires ont arrêté d‘être versés à la fin de la CAN”, déplore la jeune femme.
- Tropicale –
“Comment je peux vivre avec mes trois enfants sans travailler ? Nous sommes assis (au chômage, ndlr). On veut juste qu’on nous remette l’eau dans l’hôtel et qu’on paye nos salaires, pour qu’il puisse à nouveau fonctionner”, peste l’ancienne femme de chambre. Rencontrée en juillet par l’AFP, elle confirme un mois plus tard par téléphone que la situation n’a pas changé.
Contactées par l’AFP, l’administration de l’hôtel et l’Agence gabonaise de développement et de promotion du tourisme et de l’hôtellerie (Agatour) n’ont en revanche pas donné suite.
Au stade, un solide cadenas verrouille la grille. Les herbes folles prennent d’assaut la moderne infrastructure jaune et verte, couleurs du Gabon, sous des pancartes “Coupe d’Afrique des Nations”.
“Bon, c’est vrai qu’il n’y a pas eu beaucoup de matches depuis la CAN. Mais c’est un stade d’entraînement, c’est normal !”, explique un habitant, en train de siroter une Regab (la bière nationale) dans un bar le long de la route principale.
“Il faut dire qu’il n’y a plus d‘équipe de Bongoville dans le championnat”, ajoute-il sans vouloir dévoiler son nom. En 2014, après deux ans en division nationale, l’AC Bongoville a disparu des radars.
Ailleurs dans le pays, des mauvaises langues affirment que le stade et l’hôtel cinq étoiles sont des faveurs présidentielles à son fief, comme les routes impeccables de la province qui ont accueilli début mars les premières étapes de la Tropicale, principale rendez-vous cycliste africain du calendrier international.
“Non, cela s’inscrit dans une volonté de développer le tourisme dans les plateaux Batéké”, répond le sous-préfet, Joseph Matsiengui-Boussemba.
Ces plateaux de savanes, qui s‘étendent entre le “village” des Bongo et la frontière congolaise, représentent un des principaux atouts touristiques du Gabon, hâvre de verdure et de biodiversité au coeur de l’Afrique des forêts.
“Bongoville devient un poste avancé pour le tourisme, où les touristes peuvent faire escale avant d’aller dans les plateaux et les canyons”, explique M. Matsiengui-Boussemba. “L’idée, c‘était (d’accueillir) la CAN, et ensuite de développer le tourisme dans la région”.
Pas évident que ce discours ne rassure Géraldine. “Nous, les employés, on ne veut pas que l’hôtel se gaspille, c’est notre bijou ici a Bongoville”.
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